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Accueil / Actualité  / Interdiction des puffs : une mesure antitabac nécessaire selon Élisabeth Borne
Interdiction des puffs
EU2017EE Estonian Presidency, CC BY 2.0 https://creativecommons.org/licenses/by/2.0, via Wikimedia Commons

Aucune hausse du prix du tabac en 2024, mais une interdiction des cigarettes électroniques jetables, dites « puffs », comme mesure phare du nouveau plan de lutte antitabac… c’est ce qu’a confirmé la Première ministre française, dimanche 3 septembre 2023, au micro de RTL. Entre raccourcis et confusions, un éclairage semble nécessaire. Explications.

Une hausse du tabagisme en France ?

« La consommation de tabac est repartie à la hausse » a affirmé la Première ministre française Élisabeth Borne ce dimanche 3 septembre 2023, au micro de RTL. Une déclaration pour le moins étrange puisque, si la prévalence tabagique (chez les femmes notamment) avait augmenté entre 2019 et 2021, les dernières données du Baromètre de Santé Publique France ont montré une stabilisation, voire une légère baisse globale de la consommation de tabac. Et ont plutôt relevé des inégalités sociales très marquées selon les régions et les situations, avec une tendance au tabagisme bien plus élevée chez les populations défavorisées, les personnes au chômage et celles n’ayant aucun diplôme ou un diplôme inférieur au Baccalauréat.

En tous les cas, le tabagisme reste un enjeu crucial de santé publique pour le gouvernement, bien décidé à contrer les 75 000 décès qu’il cause environ chaque année, en France.

Interviewée à la veille de la rentrée, la Première ministre en a donc profité pour confirmer la présentation prochaine d’un nouveau plan de lutte antitabac. La mesure phare, déjà dans les tuyaux depuis juillet 2023 dernier, et réaffirmée par la cheffe du gouvernement ? « L’interdiction des cigarettes électroniques jetables, les fameuses « puffs » qui donnent de mauvaises habitudes aux jeunes ».

L’interdiction des puffs pour lutter contre le tabagisme

Si vapoter n’est pas fumer – et Élisabeth Borne devrait savoir faire la distinction puisqu’elle est elle-même connue pour sa tendance à vapoter tout le temps et partout, surtout dans l’hémicycle – la confusion est pourtant de mise ici.

Surfant, encore et toujours, sur le fameux mythe de l’effet passerelle, théorie toujours réfutée à l’heure actuelle qui voudrait qu’un jeune s’essayant à la cigarette électronique devienne irrémédiablement fumeur, la Première ministre juge les puffs responsables du passage vers le tabac. Ce, qu’elles contiennent ou non de la nicotine : « on peut nous dire que ce n’est pas de la nicotine. Mais c’est un réflexe, un geste auquel les jeunes s’habituent. Ensuite, c’est comme ça qu’ils vont vers du tabagisme, et il faut arrêter cela » affirme la ministre au micro de RTL.

Devrait-on en comprendre, en lisant entre les lignes, que les puffs sont les premières responsables de ladite « hausse du tabagisme » avancée par Élisabeth Borne ? Car, selon une enquête de l’Escapad, effectuée en 2022, et dont les conclusions ont été reprises sur le site officiel du gouvernement français pour l’article « Tabagisme en 2022 : un nombre de fumeurs stable et des inégalités de santé toujours marquées », le tabagisme a plutôt « considérablement diminué chez les adolescents »,passant « de 25,1 % de fumeurs quotidiens parmi les jeunes de 17 ans à 15.6 % en 2022 ».

Or, pour reprendre les propos de l’ASH, principale organisation antitabac de Grande-Bretagne, dans sa quête des fakenews sur la vape : « si le vapotage était une porte d’entrée vers le tabagisme, à mesure que le vapotage augmenterait, on s’attendrait à ce que les taux de tabagisme recommencent à augmenter ».

Plus encore, l’enquête du Pr Lion Shahab, menée aux États-Unis entre 2014 et 2017, tend plutôt à indiquer que les jeunes ayant expérimenté la vape sont alors moins susceptibles de devenir des fumeurs réguliers !

Interdire, est-ce vraiment la solution ?

Au vu des différentes études réalisées en France comme ailleurs sur le vapotage chez les jeunes, on peut se demander si l’interdiction des puffs ne va pas produire l’effet inverse de celui escompté. Et rapprocher les jeunes du tabac plutôt que de les en éloigner. Surtout si elle ne se double pas de véritables mesures antitabac.

Pourtant, comme l’a énoncé Élisabeth Borne au micro de RTL, si d’autres mesures sont prévues (sans qu’elles ne soient détaillées par la Première ministre), le gouvernement « ne prévoit pas d’augmenter la fiscalité sur le tabac l’an prochain » puisqu’une hausse a déjà été mise en place cette année. Et s’est d’ailleurs soldée par le renforcement du marché noir, du jamais vu en France.

En définitive, si les puffs sont indéfendables d’un point de vue écologique, comme l’a bien mentionné Florent Biriotti, fondateur du mouvement JeSuisVapoteur, prendre pour seul argument leur dangerosité chez les jeunes est un non-sens total. D’autant plus qu’elles sont déjà soumises à la réglementation relative à l’âge (- 18 ans), qu’il faudrait déjà commencer à faire appliquer correctement…

Encore une fois, il semble que le gouvernement ait changé son fusil d’épaule, sans même s’en rendre compte : il tire désormais à vue sur les produits du vapotage, préférant interdire les puffs, et peut-être prochainement taxer les produits de la vape voire bannir ses arômes plutôt que de les utiliser intelligemment pour remplir son objectif (bien mal engagé) : moins de 5 % de tabagisme à l’horizon 2040.

Sources :

« Tabac : pas de hausse des prix en 2024, mais vers une interdiction des « puffs », annonce Borne – Interview RTL », dimanche 3 septembre 2023 : https://www.rtl.fr/actu/politique/invitee-rtl-tabac-pas-de-hausse-des-prix-en-2024-mais-vers-une-interdiction-des-puffs-annonce-borne-7900293586

« Tabagisme en 2022 : un nombre de fumeurs stable et des inégalités de santé toujours marquées » – MILDECA – Site officiel du gouvernement français

Shahab L, Beard E, Brown J. Association of initial e-cigarette and other tobacco product use with subsequent cigarette smoking in adolescents: a cross-sectional, matched control study. Tobacco Control 2021;30:212-220 : https://tobaccocontrol.bmj.com/content/30/2/212


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