Pour mieux comprendre l’évolution du marché du tabac, les problématiques que pose la montée de la contrebande pour les buralistes de France, mas aussi la place croissante qu’occupent désormais les produits du vapotage dans les débits de tabac, on reçoit Philippe Alauze, président de la Fédération des buralistes de Paris et d’Île-de-France.
La contrebande de tabac : un enjeu crucial
Le marché parallèle du tabac explose en France. D’après différentes enquêtes menées 1, la contrebande représenterait désormais plus de 38 % du marché. Autrement dit, aujourd’hui, au moins 4 personnes fumeuses sur 10 ne se fourniraient plus en cigarettes dans les bureaux de tabac, mais par d’autres biais.
Un grave problème économique pour les buralistes bien sûr, pointe Philippe Alauze, président de la Fédération des buralistes de Paris et d’Île-de-France (IDF), mais aussi un combat devenu crucial en France, tant au niveau sanitaire que sociétal.
« La consommation ne baisse pas. C’est l’achat du produit légal qui est en baisse. Donc, elle est ô combien impactante pour les commerçants de proximité et les indépendants. Mais aussi sous les gîtes de la moralité […] Aujourd’hui, ça devient un sujet sociétal. Depuis la pandémie COVID surtout, les modes de consommation ont changé. L’achat de cigarettes de contrebande, de contrefaçon, en tout cas illégal, c’est un sport national de tous les Français. »
– Philippe Alauze pour Oneshot Media, ChesterView, juin 2025
Pour Philippe Alauze, buraliste de métier, la cause première de cette contrebande est sans appel : le prix du tabac.
« En augmentant le prix, on augmente également la valeur du marché illégal. On est en train d’alimenter, par le prix, un phénomène de dangerosité sociétale […] On en arrive à des camions entiers de Logista qui se sont faits kidnappés. Donc là, on touche à des phénomènes de criminalité proches de ce que l’on peut voir avec le narcotrafic »
– Philippe Alauze pour Oneshot Media, ChesterView, juin 2025
C’est pourquoi, pour Philippe Alauze, la solution ne saurait se trouver dans l’augmentation continuelle du prix des cigarettes, qui ne fait qu’accélérer la montée de la contrebande. Pour accompagner les fumeurs vers l’arrêt, le gouvernement doit reconnaître l’importance des nouveaux produits nicotinés sans combustion. Et changer de direction : plutôt que d’enchaîner les interdits, il devrait miser sur la réduction des risques et l’éducation à ces produits.
L’appui des nouveaux produits nicotinés sans combustion dans la lutte anti-tabagique
Ces dernières années, le marché des nouveaux produits à la nicotine a pris une certaine ampleur en France, impulsé notamment par la cigarette électronique et sa popularité croissante chez les fumeurs 2. Une manne financière évidente pour les buralistes, mais aussi un moyen d’élargir leur spectre et de renforcer leur position de commerces de proximité.
Un objectif qui ne peut être concrétisé que par la mise en œuvre d’une réglementation plus rigoureuse et claire sur ces produits, notamment sur internet, estime Philippe Alauze.
« Nous avons un produit d’addiction. Je suis contre les sujets qu’on ne maîtrise pas quand on porte un produit d’addiction. Il faut un cadre le plus rigide possible, que le produit soit encadré sur internet. Sinon, on voit les dérives »
– Philippe Alauze pour Oneshot Media, ChesterView, juin 2025
Pour le président de la Fédération des buralistes de Paris et d’IDF, un meilleur compromis semble possible, entre tout interdire et ne rien faire.
« Quand je vois que dans le marché de la vape, on commence à identifier des volontés de vouloir mettre des interdits, sur les saveurs notamment, je trouve ça aberrant, c’est un non sujet. Et ce serait une vraie décrédibilisation complète de la vape. Sans traiter le vrai problème. Pour moi, quand je parle vape, je parle santé »
– Philippe Alauze pour Oneshot Media, ChesterView, juin 2025
Philippe Alauze plaide notamment pour la mise en place de licences, à l’initiative des deux filières. Gage de professionnalisme de la part des acteurs du marché, mais également de sécurité pour le consommateur.
L’interview complète de Philippe Alauze
Chasse aux mégots, vente aux mineurs, interdiction potentielle des sachets de nicotine, démantèlement de réseaux de contrebande, stratégies politiques… Philippe Alauze aborde tous ces autres sujets et plus encore dans l’interview complète, disponible ci-dessous.
Notes
1 38 %, d’après les chiffres relevés par une étude Ernst and Young (EY Parthenon) pour Philip Morris International et Japan Tobacco International dévoilée par RMC en décembre 2024.
Ce chiffre atteindrait même 49,4 % pour 2024 selon une autre étude, de KPMG cette fois, pour l’industriel Philip Morris International, révèle Ouest France en juin 2025.
2 Voir l’enquête réalisée par l’IFOP pour le collectif JESUISVAPOTEUR en juin 2023.