La puff est une fois encore au centre de toutes les polémiques : depuis la diffusion d’une certaine vidéo de Squeezie, dans laquelle on voit Alain Chabat et Adèle Exarchopoulos vapoter discrètement sur le plateau, les critiques s’enchaînent sur la toile et les réseaux sociaux.
Alors, est-il légal de vapoter sur YouTube ? Que dit la loi à ce sujet ? On fait le point.
La puff s’invite chez Squeezie
Samedi 19 octobre 2024, le célèbre youtubeur français Squeezie a mis en ligne un nouvel épisode de son émission à succès “Qui est l’imposteur ?”.
Invités de marque pour l’occasion : Alain Chabat et Adèle Exarchopoulos, en pleine promotion du film L’Amour Ouf de Gilles Lellouche, sorti en salles le 16 octobre dernier.
L’émission se déroule comme d’ordinaire, à un détail près : une puff se cache parmi les invités, dans les mains d’Adèle Exarchopoulos. On la voit recracher sa vapeur, à 9:14″, puis c’est au tour d’Alain Chabat, à 13:02″, qui la rend ensuite à Adèle.
Erreur au montage, maladresse des invités ou promotion intentionnelle d’un produit du vapotage… chaque internaute et “Squeezos” sur la toile n’a pas manqué de partager son opinion. Au lendemain déjà, ces images avaient fait le tour d’internet, reprises par tous les médias.
Partout, en gros titres : “Alain Chabat et Adèle Exarchopoulos fumant une puff chez Squeezie”, “Alain Chabat et Adèle Exarchopoulos ont choqué de nombreux internautes”, “Alain Chabat et Adèle Exarchopoulos sous le feu des critiques”… Et une vidéo toujours en ligne. Pourquoi ?
Utiliser une puff sur YouTube : légal ou pas ?
Si l’on se réfère strictement au Droit, les conditions générales d’utilisation de la plateforme sont claires : sur YouTube, seule la diffusion d’images montrant l’utilisation d’une cigarette électronique par un mineur est interdite [1]. De la même manière qu’acheter un produit du vapotage ou tout simplement vapoter est illégal de par la loi française lorsque l’on a moins de 18 ans [2]. Techniquement, la vidéo de Squeezie ne les a donc pas enfreintes. Jusqu’à preuve du contraire, Alain Chabat et Adèle Exarchopolous sont bel et bien majeurs.
Concernant les suspicions de promotion d’un produit du vapotage, là encore, l’Arcom (ou l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) détient une partie de la réponse. Sur le site du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) [3], on peut lire :
Alors que la publicité en faveur du tabac est interdite (art. L. 3511-3 du Code de la santé publique), la jurisprudence considère que le seul fait de diffuser des images de personnes fumant devant les caméras n’est pas constitutif d’actes de publicité ou de propagande prohibés par les textes. Selon le juge, de tels actes supposent, de la part de celui qui s’y livre, une action “concrète, volontaire et délibérée destinée à promouvoir l’usage du tabac”
Précisons que s’il est ici mentionné le tabac, les produits du vapotage sont également compris dans cette formulation. C’est pourquoi, d’après YouTube, la vidéo de Squeezie n’est pas en infraction. Le géant américain jugeant notamment qu’il n’y a pas promotion du vapotage et que les deux acteurs ont utilisé la puff de façon “modérée”.
Voir une puff chez Squeezie : dans quelle mesure est-ce tout de même un problème
Deux problèmes néanmoins.
Tout d’abord, d’après la loi [4], il est interdit de fumer ou de vapoter dans des lieux fermés et couverts qui constituent des lieux de travail. Or, les plateaux de télévision et les studios peuvent tout à fait relever de cette définition.
Ensuite – et l’on se trouve sans doute là au cœur du problème : le youtubeur est connu pour être suivi par un public relativement jeune. En tant qu’influenceur, il aurait donc été mieux avisé de sa part de couper ces séquences au montage. Ou du moins d’avertir son public, voire de restreindre l’accessibilité de la vidéo par une limite d’âge.
Cela étant dit, les réactions des médias comme des internautes le montrent bien : dès que le mot “puff” est prononcé, les idées reçues vont bon train. On retrouve ainsi des termes profondément inexacts comme “fumer une puff”, et on se trouve une fois encore face à une désinformation flagrante.
S’il parait évident qu’Adèle Exarchopoulos aurait du s’abstenir de vapoter face caméra, il reste faux d’assimiler la puff – qui n’est, rappelons-le, qu’une cigarette électronique jetable – aux dangers de la cigarette à combustion.
Espérons donc que tous tirent les bonnes leçons de cette maladresse : vapoter oui, à condition d’être majeur et ancien fumeur, et préférablement avant et entre deux tournages, hors caméra, précisément lorsque l’on sait que des mineurs pourraient faire partie des spectateurs !
Notes
[1] Voir Règlement relatif aux contenus dangereux ou nuisibles, Règles YouTube, section “Exemples de contenus dangereux ou nuisibles”
[2] Voir Article L.3513-5 et R.3515-6 du Code de la santé publique
[3] Voir la réponse du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel sur les produits du tabac et du vapotage à l’écran
[4] Voir Article L.3513-6 du Code de la santé publique
