Au Québec, l’interdiction des arômes n’est en vigueur que depuis quelques mois, et déjà, les dangereux effets de la loi se font sentir. Non seulement la mesure n’a pas permis d’endiguer le vapotage chez les jeunes, qui vapotent plus que jamais, mais elle a également ramené ces anciens fumeurs devenus vapoteurs vers le tabac fumé !
Octobre 2023 : le Québec interdit les arômes de la vape pour protéger la jeunesse
Mardi 31 octobre 2023, le gouvernement québécois prenait une mesure drastique pour “réduire l’attrait du vapotage chez les jeunes” : interdire toutes les saveurs du vapotage, exception faite du goût tabac.
Une grande victoire du point de vue des associations et institutions antitabac tels que le Conseil québécois sur le tabac et la santé (CQTS) et la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac (CQCT), qui ont toutes décrit cette interdiction comme “une mesure essentielle à la lutte contre la dépendance à la nicotine” et “une excellente nouvelle pour la santé des jeunes”.
Seules continuaient d’alerter des associations de défense de la vape, qui y voyaient non seulement là une mesure infondée, mais également dangereuse.
“Il est d’ores et déjà prouvé que l’interdiction des vapes aromatisées entraîne une augmentation des taux de tabagisme”, a notamment répété sans relâche la Coalition des droits des vapoteurs du Québec (CDVQ) depuis l’annonce du projet de loi.
Et effectivement. Comme San Francisco en 2021 (1), puis les États-Unis tout entier en 2023 (2) ou encore l’Australie en ce début d’année 2024 (3), le Québec n’y a pas échappé : seulement six mois après l’interdiction des arômes, il a vu son taux de fumeurs grimper en flèche.
Avril 2024 : les vapoteurs québécois se (re)mettent à fumer
C’est notamment ce qu’est venue démontrer l’étude sur l’impact de la nouvelle loi sur le vapotage réalisée par l’institut de sondage Leger pour CDVQ.
Collectées du 26 mars au 7 avril 2024 auprès de 1 001 Québécoises et Québécois, les données ont révélé des taux plus qu’inquiétants de retour du tabagisme dans la province.
Alors que 17 % des interrogés ont déclaré vapoter “ne serait-ce qu’à l’occasion”, soit 235 personnes sur les 1001 sondées, quasiment la moitié d’entre elles (47 %) ont également confié avoir commencé ou recommencé à fumer, ou y songer.
Des témoignages d’autant plus alarmants lorsque l’on sait que plus de 6 vapoteurs sur 10 étaient fumeurs avant de commencer à vapoter, et que, pour 75 % d’entre eux, la cigarette électronique était justement la solution pour arrêter de fumer.
Mais, privés désormais de ce qui a joué un rôle primordial dans leur choix de passer à la vape – les arômes – ils sont malheureusement aujourd’hui nombreux à préférer fumer du tabac plutôt que vapoter une saveur tabac.
Interdiction des arômes : la fausse bonne idée
Le Québec l’a ainsi tristement démontré : loin de protéger les jeunes, l’interdiction des arômes n’a eu pour effet qu’une dangereuse réaction en chaîne.
D’un côté, la tranche des 16-24 ans continue de représenter la plus grande proportion de vapoteurs (30 %). Contournant habilement la loi, les jeunes et les mineurs se procurent leurs produits par d’autres canaux, comme le marché noir, s’exposant ainsi à des risques sanitaires accrus.
De l’autre, les ex-fumeurs adultes qui avaient pu avancer dans leur sevrage tabagique grâce à la e-cigarette retombent de nouveau dans l’engrenage du tabagisme, faute d’arômes pour maintenir leur motivation à flot.
Et plus malheureux encore, on en arrive même à voir plus d’un vapoteur sur 10 commencer à fumer (16 %), alors qu’il n’avait jusqu’alors jamais goûté aux dangers de la cigarette à combustion !
Comment, alors, continuer de voir les mesures antivape comme des actions essentielles pour avancer dans la lutte antitabagique ? Et comment continuer de parler d’effet passerelle lorsqu’il apparait de manière aussi évidente que la vape et ses arômes sont, non des instigateurs qui pousseraient les non-fumeurs dans les bras du tabagisme, mais bien des distracteurs, qui les gardent éloignés d’un tel fléau ?!
« Le ministre Dubé doit revenir sur sa décision, faire un pas de recul et présenter des solutions pour encadrer le vapotage tout en permettant les saveurs », a ainsi appelé Valérie Gallant, la présidente et porte-parole de la CDVQ.
Sources
(1) Friedman AS. A Difference-in-Differences Analysis of Youth Smoking and a Ban on Sales of Flavored Tobacco Products in San Francisco, California. JAMA Pediatr. 2021;175(8):863–865. doi:10.1001/jamapediatrics.2021.0922
(2) JeSuisVapoteur. USA : quand l’interdiction des arômes rime avec hausse du tabagisme. Décryptage de l’étude de Friedman AS et al. de septembre 2023
(3) JeSuisVapoteur. Sans vape, les jeunes fument… davantage : le cas de l’Australie. Décryptage de l’étude du Centre australien ministériel de recherche comportementale sur le cancer de mai 2023