Bien avant l’annonce du prochain plan antitabac (et surtout antivape) par le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, ce 28 novembre dernier, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), rejoint par tout un collectif de médecins, avaient déjà alerté : les interdictions de produits alternatifs comme la vape sont contre-productives. Pour lutter contre le tabagisme, la France doit s’engager en faveur d’une véritable politique de réduction des risques… en reconnaissant et en s’appuyant sur ces produits !Le 26 septembre 2023, l’Office parlementaire OPECST en appelait à l’évaluation scientifique de la vape en tant qu’outil de réduction des risques
En septembre 2023, l’OPECST faisait paraitre son rapport sur les « nouveaux produits du tabac ou à base de nicotine : lever l’écran de fumée » (1).
L’une de ses recommandations phares ? « Adopter une approche de réduction des risques pour les fumeurs qui ne pourraient ou ne souhaiteraient pas utiliser les traitements nicotiniques traditionnels, à l’instar du Royaume-Uni qui intègre la cigarette électronique à sa stratégie de lutte contre le tabagisme ».
Dans ce rapport, l’organe parlementaire en appelait ainsi à une évaluation rigoureuse de toutes les alternatives à la cigarette en tant que méthode d’aide à l’arrêt et de réduction des risques. L’État y était encouragé à engager des recherches indépendantes et à s’en servir pour orienter ses futures politiques de santé publique.
Le 3 novembre 2023, 25 médecins cosignaient une tribune pour soutenir la position de l’OPECST sur la vape
Une semaine après la publication des recommandations de l’OPECST, 25 médecins* cosignaient une tribune en faveur de la réduction des risques (2), afin d’inciter le gouvernement français à prendre en considération cette pertinente stratégie.
« Quand nous diagnostiquons une addiction, nous n’avons pas – ou rarement – devant nous le malade parfait qui accepte l’abstinence, indiquent-ils dans leur plaidoyer, repris ce 13 décembre 2023 par le magazine Sciences et Avenir (3). Chaque alternative peut correspondre à un profil de consommateur et lui donner une chance de sortir de la cigarette ».
Mieux encore, au vu de sa moindre dangerosité et de son fonctionnement, la vape leur apparait comme l’une des meilleures alternatives : elle supprime la menace (la combustion), conserve la fumée simulée (la vapeur) tout comme la gestuelle, et permet de gérer l’apport en nicotine (essentielle au fumeur, alors dépendant, pour se désaccoutumer) tout en prenant plaisir à se sevrer grâce à ses arômes divers et variés.
Résultat, grâce à la vape, on peut « diminuer progressivement la dose de nicotine à ajouter au e-liquide, finir par vapoter seulement du e-liquide, et petit à petit arrêter de vapoter et réussir son sevrage », expliquent-ils.
La réduction des risques : une solution viable ?
En France, on l’applique déjà sur la route, en limitant la vitesse autorisée et en exigeant le port de la ceinture de sécurité afin de réduire les risques d’accidents. Ou encore sur les plages, en été, en informant de la nécessité d’emporter casquettes, chapeaux et crème solaire afin de réduire les risques de cancers de la peau. Mais aussi dans certains slogans d’institutions sanitaires, comme celui de Santé Publique France (SPF) qui rappelle « Pour votre santé, l’alcool c’est deux verres par jours et pas tous les jours ». Et jusque dans la prise en charge des toxicomanies.
Mais surtout, cette stratégie du « step by step, du pas à pas », comme l’explique depuis toujours le Dr William Lowenstein, addictologue français, président de SOS Addictions et cosignataire de la tribune, a déjà fait ses preuves ailleurs, dans la lutte antitabac.
Au Royaume-Uni, où le gouvernement a choisi de miser sur la vape, le taux de prévalence tabagique est désormais de 13 %. En Suède, des produits alternatifs tels que le snus, le sachet de nicotine et la vape ont permis au pays de devenir le premier – et le seul – à avoir atteint l’objectif de 5 % de fumeurs fixé par l’Union européenne. Ce, avec 17 ans d’avance !
Aussi, pour ces 25 médecins, une telle stratégie de réduction des risques, appliquée aux produits alternatifs nicotinés en France, est la meilleure manière de lutter véritablement contre le tabagisme.
« Les stratégies de santé publique fondées prioritairement sur la prohibition et la répression ont échoué, écrivent-ils de concert. Il faut regarder cette réalité en face, pour en finir avec la tyrannie de l’idéal [l’abstinence] et proposer ce qui fonctionne déjà à l’étranger […] Il s’agit de redéfinir sur cette base la politique française de lutte contre le tabagisme en y incluant l’innovation et une approche pragmatique de réduction des risques pour atteindre les objectifs de l’État et réellement servir la santé de nos concitoyens ».
Une réalité que le gouvernement français a semble-t-il préférer ignorer de nouveau lors de la rédaction de son prochain plan de lutte antitabac 2023-2027…
Sources :
(1) « Nouveaux produits du tabac ou à base de nicotine : lever l’écran de fumée », Les notes scientifiques de l’Office, Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), septembre 2023.
Version PDF à télécharger (langue française).
(2) « Lutte contre les addictions : le parlement opte (enfin) pour un pragmatisme scientifique », Tribune d’opinion, co-signée par un collectif de médecins, La Tribune, 3 novembre 2023. URL : https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/lutte-contre-les-addictions-le-parlement-opte-enfin-pour-un-pragmatisme-scientifique-982219.html
(3) « Lutte contre les addictions : “le tout ou rien ne marche pas ” », Sciences et Avenir, 13 décembre 2023. URL : https://www.sciencesetavenir.fr/sante/lutte-contre-les-addictions-le-tout-ou-rien-ne-marche-pas_175582
*Signataires :
Dr William Lowenstein, Addictologue Président SoS Addiction
Dr Imane Kendili, Psychiatre Addictologue Présidente de African Global Health
Dr Alain Tolédano, Oncologue, radiothérapeute, Président Institut Rafael Levallois-Perret
Dr Jean-Michel Delile, Président de la fédération Addiction
Marie Josée Augé-Caumon, pharmacienne – co-pte du groupe Santé-Addictions, rapport CESE sur la réduction des risques tabac et alcool, pte de CAARUD
Dr Jerôme Palazzolo, Psychiatre Addictologue Nice
Dr Hany Neamatalla, Cardiologue Paris Pompidou, Sénateur en Egypte
Pr Gabriel Malka, Responsable du Pôle Santé de l’Université Mohammed VI- Maroc
Pr Chetty Morgan, Chairman of IPA-Foundation – USA
Dr Jean-Pierre Couteron, Addictologue Paris
Jean-Francois Narbonne, Toxicologue – Fondateur du Laboratoire de Toxicologie Alimentaire – Université Bordeaux
Dr Bertrand Lebeau Leibovici, Addictologue
Jennifer Oses, Ecotoxicologue
Dr Michael Bohbot, Médecin généraliste
Dr Vittorio Bacchetta, Médecin généraliste
Pr Redouane Rabii, Médecin Urologue Certifié de l’Ordre National · Professeur à l’université de médecine de Casablanca
Dr Renaud David, Psychiatre
Dr Nathaniel Scher, Oncologue Radiothérapeute
Dr Pierre Guedj, Cardiologue
Michael Stora, Psychanalyste
Pr Stéphane Mouly, Médecine interne
Dr Pierre Rouzaud, Médecin tabacologue, Toulouse
Pr Idrissi Hamza, Anesthésiste Réanimateur
Dr Serigne-Magueye Gueye, Professor of Urology at University Cheikh Anta DIOP, Dakar, Senegal and Chair of Urology, Director general of Campus Franco-Sénégalais
Dr Benjelloun Faycal, Opthamologue
Guillaume
Je mets cet article que je trouve particulièrement complémentaire.
https://www.generationsanstabac.org/article/influence-de-lindustrie-du-tabac-dans-le-lobbying-pro-vapotage-lexemple-du-royaume-uni/
Tout est dans le titre du lien…